Accueillir le Ressuscité en ce jour de Pâques
Je voudrais bien, pour partager avec vous mes vœux en cette fête de Pâques, retrouver l’enthousiasme des Pères de l’Église qui ont tant laissé parler leur espérance, leur sens poétique, la beauté des images qu’ils portaient avec eux…
Ainsi, Épiphane, un évêque palestinien du 4e s, dit : « Le soleil de Justice, disparu depuis trois jours, se lève aujourd’hui et illumine toute la création. Christ au tombeau depuis trois jours et existant avant les siècles ! Il pousse comme une vigne et remplit de joie toute la terre habitée » (Sermon pour la Résurrection cité par Jean-René Bouchet, Lectionnaire pour les dimanches et fêtes, Cerf, 1994, p. 195 et ss).
Je voudrais bien… Mais ce ne sont pas ces mots qui viennent. Où est-il ce soleil, où est-elle cette lumière ? Où est-elle cette vigne chaleureuse, et la joie, où s’est-elle cachée ?
Ma joie est plus sourde, elle est l’héritière de vingt siècles qui ont un peu raboté l’enthousiasme de nos cœurs. Le Royaume de Dieu sur terre ne parvient décidément pas à se construire et sans doute est-ce ainsi que Dieu le veut.
Mais si les signes extérieurs de la foi, les signes publics, sont difficiles à voir, il me semble cependant que c’est de la source intérieure, intime à chacun que vient la joie.
Joie d’une présence, joie d’un salut, joie d’être soi, à nul autre pareil, fondé en Dieu, joie d’une annonce heureuse qui doit se propager car elle réjouit les cœurs.
Et j’invoquerai pour soutenir mon propos ces deux questions que pose un autre père de la même période, saint Cyrille de Jérusalem (id, p. 203-204) : « En quel lieu ressuscite le Sauveur ? » Il répond : « dans la caverne du rocher », « celle qui est devant la porte du tombeau du Sauveur ». Oui, le lieu obscur et retiré de la Résurrection, ce sont nos âmes, désirantes, aussi assoiffées que ne l’était la Samaritaine.
Et ensuite : « En quelle saison se réveille le Sauveur ? Au moment des fleurs, répond-il. La saison des fleurs, pour nos âmes, ce peut-être chaque jour de l’année, mais en s’unissant au rythme de la nature, on rassemble en ce jour tous les autres, afin de les célébrer tous.
Aussi, je souhaite à chacun d’accueillir le Ressuscité en son âme, précieuse et retirée, et de célébrer dans la joie sa présence parmi ces fleurs tendres, fraîches et colorées qui trouvent à s’y éclore.
Anne Soupa