Scouts et guides de France : Acteurs d’une Eglise Universelle et Fraternelle
Conférence prononcée lors d’un rassemblement des Scouts et Guides de France, mai 2021Â
Je formule deux propositionsÂ
Comment peut-on s’appuyer sur l’Evangile dans nos pratiques éducatives ?Â
Comment éduquer à être un artisan de paix ?Â
1er axe de réflexion : SGDF sont un maillon de l’Eglise. Par quelles pratiques en continuité avec l’Evangile peut-on être fraternel et universel ?Â
L’évangile est un livre de vie. Evident que vs y trouverez des enseignements qui vs aideront à accompagner vos jeunes dans leur chemin de vie. Je vs propose 5 pratiques quoi ont été à la base de son ministère. Ne pas exclure, faire confiance, respecter la personne, servir, éduquer à la transcendance.Â
Le refus de l’exclusion est le premier impératif du ministère de Jésus. L’éradication de la pauvreté n’est pas le 1er objet de son ministère : « Des pauvres, vs en aurez tjs » (Jn 12, 8). Cela n’empêche qu’il est dans la ligne des prophètes qui défendaient les anawim, les pauvres de Dieu ». Et que la lutte contre la pauvreté est ss entendue dans le message fraternel de Jésus.Â
Mais Jésus est un faiseur de liens. Il a le souci de faire en sorte que les liens brisés entre un personne et son milieu social se renouent. Il veut inclure au lieu d’exclure. Aussi, Jésus réintègre ceux et celles qu’il rencontre dans le circuit des relations sociales normales.Â
Ainsi de la femme hémorroïsse que ses pertes de sang isolaient des autres, selon la Loi juive (Mc 5, 21-43) ; ainsi du lépreux guéri Mt 8, 1-4. « Va te montrer au prêtre et offre le don prescrit par Moïse. Ce leur sera une attestation ». Bcp des guérisons sont un moyen de réintégrer le corps social, car le malade, ou s’exclut de lui-même, ou est exclu par la loi sur les impuretés. Car il ne faut pas oublier que maladie= péché.Â
Lors de l’épisode de la femme adultère (Jn 81-11), Jésus rappelle encore que l’objectif central de la loi juive est d’inclure et non d’exclure. La loi doit permettre de vivre ensemble. Jésus remet les scribes et les pharisiens sous la coupe de la loi.Â
La confiance Â
Jésus entretient des relations de confiance avec ceux qu’il rencontre. Avec le centurion qui lui confie son enfant : « En entendant cela, Jésus fut dans l’admiration et dit à ceux qui le suivaient : Chez personne je n’ai trouvé une telle foi en Israël. » Mt 8, 10.Â
A la multiplication des pains. Alors qu’il n’y a rien et que les disciples proposent de renvoyer les foules pour qu’elles aillent se nourrir aux villages, Jésus leur dit : « Donnez-leur vs même à manger » (Mt 14, 16). Je ne crois pas qu’il s’agisse ici de « délégation » car les disciples n’ont pas encore vu que Jésus multiplie les pains, donc, il ne s’agit pas que les disciples fassent « comme » Jésus, mais qu’ils aient confiance en leur propre capacité à nourrir les foules.Â
Si Jésus fait confiance, il demande aussi qu’on lui fasse confiance. Aux deux aveugles (Mt 9, 27-31) qui lui disent « Aie pitié de nous, Fils de David », il demande : « Croyez-vs que je puis faire cela ? » « Oui, Seigneur, lui disent-ils. » Jésus conclut : « Qu’il vs advienne selon votre foi ».Â
Idem lors de la marche sur les eaux. « Ayez confiance, c’est moi, soyez sans crainte » (Mt 14, 27). Mais Pierre, « voyant le vent », prit peur. « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ?Â
De même encore à Nazareth, « il ne fit pas bcp de miracles, à cause de leur manque de foi » (Mt 13, 58).Â
La confiance, c’est une réciprocité, c’est un entre deux qui circule. Dans les rencontres que j’ai bien étudiées, celles avec les femmes, ce n’est pas plus Jésus que les femmes qui font confiance, c’est vraiment une relation « qui fonctionne ». Bien entendu, la confiance ne signifie ni une absence de discernement, ni un renoncement à l’autorité, quand elle est nécessaire. Â
Chez Jésus, la confiance dépasse les frontières. Elle prime sur l’identité « nationale ». L’exemple de la cananéenne le montre (Mt 15, 21-28). Jésus affirme, à la Cananéenne qui l’aborde pour lui demander en criant la guérison de sa fille, qu’il n’a été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. Aussi, il veut l’écarter. Mais elle insiste, disant être prête à manger les miettes de sa prédication. Et alors, Jésus se convertit : « Femme, grande est ta foi. Qu’il t’advienne selon ton désir ». L’une des leçons de cette péricope est de voir comme Jésus dépasse le cadre identitaire, alors qu’il voulait y rester, mais la force de cette femme, sa confiance en lui l’ont converti à cette sortie de sa manière de voir.Â
Dans le même axe d’idées, Jésus casse les codes identitaires : le bien, la foi, dépassent les frontières que les hommes construisent : « Malheur à toi, Chorazein, Malheur à toi, Bethsaïde. Car si les miracles qui ont leu lieu chez vs avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, il y a longtemps que sous le sac et la cendre, elles se seraient repenties » (Mt 11, 21). Â
Le serviceÂ
Le lavement des pieds (Jn 13). Oser présenter le service comme nourrissant.Â
Le respectÂ
On pourrait trouver d’innombrables exemples. Je me contente d’un : A l’infirme de la piscine de Bethesda : « Veux-tu guérir » (Jn 5, 6). On ne fait pas le bien malgré les intéressés. C’est irrespectueux de leur demande.Â
Eduquer à la transcendanceÂ
Jésus se retire souvent pour prier, Jésus parle souvent de son Père, Jésus s’adresse à son Père dans ses grands discours testamentaires (Jn 14-17).Â
Mais il nous éduque aussi à l’au-delà de nous-mêmes. « Ton Père qui voit dans le secret te le rendra » Mt 6, 6). Ns avons un interlocuteur « secret » avec qui un échange a lieu.Â
Cet au-delà qui hier était une évidence, est aujourd’hui une audace. Je crois qu’il faut oser défendre le rapport à plus grand que soi, à l’au-delà de soi. Il est constitutif de l’être humain.Â
2e axe de réflexion : quels sont pour moi les grands défis de l’Eglise de demain ?Â
Soulagement de voir réapparaître le mot « demain » dont j’ai hélas constaté qu’il était absent de la plupart des prises de parole de l’institution. Combien de fois j’ai encouragé des personnes qui se lamentaient à aller demander à leur évêque comment sera son diocèse dans 20 ans. Quelle est sa vision prospective ? Combien de fidèles, combien de prêtres, combien de laïcs engagés, où seront les grands pôles urbains, quelles religions en présence, quelles grandes questions vont occuper les personnes du diocèse, comment s’y préparer, comment, comment…. Demain sera fait.Â
On ne vit pas en gérant la fin. On vit en regardant devant.Â
Devant, que trouve-t-on ? une Eglise de baptises. Bien le préparer à témoigner pour construire l’Eglise. Vos jeunes ont une grande responsabilité.Â
Ces défis sont, d’une part en continuité avec les pratiques éducatives évangéliques dont ns venons de parler.Â
Ne pas exclure, faire confiance, servir, respecter la personne, éduquer à la transcendance.Â
Et ns constatons qu’ils rejoignent exactement ceux de votre débat : universalité et fraternité.Â
Une Eglise qui dise « oui », oui à la vie, oui aux autres, quels qu’ils soient. Oui à ceux et celles qu’elle exclut des responsabilités, des sacrements,Â
Une Eglise de frères. Renonçons au « Mon Père » … Renonçons à la monarchie de droit divin qu’est l’institution ecclésiale, osons la fraternité pour de bon.Â
La fraternité est l’avenir de l’Eglise. Ce n’est pas la fin de l’autorité. Mais le rappel que l’autorité ne vient que de l‘assentiment du peuple.Â